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Intranet, code de bonne conduite et vie privée
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NANTERRE
REFERES
ORDONNANCE DE REFERE RENDUE LE
06 Octobre 2004
DEMANDEUR
COMITE D'ETABLISSEMENT NOVARTIS PHARMA
DEFENDERESSE
SAS NOVARTIS PHARMA
INTERVENANTE VOLONTAIRE
FEDERATION NATIONALE DE lA PHARMACIE FORCE OUVRIERE
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président : Claire LACAZE, Président, tenant l'audience des référés par délégation du Président du Tribunal,
Greffier : Christophe ALLANDRIEU, Greffier
Statuant publiquement, par ordonnance Contradictoire, en premier ressort :
Nous, Président, après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils à l'audience du 22 septembre 2004, avons mis l'affaire en délibéré à ce jour :
Vu l'acte introductif d'instance du 27 août 2004 ;
Vu l'intervention volontaire de la Fédération nationale de la pharmacie Force ouvrière au côté du demandeur ;
Vu les conclusions de la société NOVARTIS PHARMA SAS ;
Exposé du litige
La société NOVARTIS après information et consultation du personnel a mis en place un "code de conduite Novartis" en août 1999, qui définit un certain nombre de règles d'éthique applicables à l'ensemble du personnel. En complément, et explication de ce texte la société NOVARTIS a développé dans une directive de juillet 2004, diffusé sur intranet NOVARTIS ce qu'elle entend par la "politique du groupe NOVARTIS sur les conflits d'intérêts".
Or selon les demandeurs, un grand nombre de ces nouvelles dispositions constitue une modification du règlement intérieur et aurait dû donner lieu à une communication préalable de l'inspection du travail, du CE et du CHSCT.
Les demandeurs sollicitent en conséquences, qu'il soit enjoint à la défenderesse de faire cesser, sans délai, la diffusion de toutes ces informations sur son site intranet, jusqu'à une consultation régulière des représentants du personnel et ce sous astreinte de 100 000 euros par jour de retard ; et condamner la société NOVARTIS à leur payer 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société NOVARTIS souligne que dans un souci d'apaisement, elle a retiré de son site les dispositions litigieuses: du "tableau conflits d'intérêts" (premier lien) et du paragraphe 5 du document "politique du groupe NOVARTIS sur les conflits d'intérêts" (deuxième lien).
La société considère qu'elle n'avait pas à consulter le CE s'agissant du rappel de normes préexistantes contractuelles ou légales, qu'ayant retiré elle-même les dispositions ayant donné lieu à débat, le référé ne se justifie plus et sollicite en conséquence 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
DISCUSSION
Attendu que s'il est louable pour une société de rappeler à son personnel un certain nombre de règles d'éthique dans la conduite de sa vie professionnelle, et s'il est normal que soient envisagés les cas où peuvent se produire des conflits d'intérêts entre la vie professionnelle et la vie personnelle, encore faut-il que ces règles ne constituent pas une atteinte à la vie privée du personnel, ou une modification indirecte du règlement intérieur.
Attendu qu'il ressort des paragraphes non supprimés, que la société NOVARTIS entend être informée par ses collaborateurs de tout type "d'occupation gouvernemental, politique, bénévole ou civique" et entend soumettre à autorisation lesdites activités.
Attendu que de surcroît NOVARTIS entend gérer indirectement les activités des autres membres de la famille des collaborateurs.
Attendu que si la société NOVARTIS a supprimé les sanctions attachées au non respect des prescriptions édictées, il n'en demeure pas moins que ces règles doivent être respectées par le personnel, ainsi qu'il résulte du contrat de travail qui stipule : "le collaborateur doit se conformer strictement aux accords collectifs et aux règlement notamment le règlement intérieur ... Les instructions écrites données par la société NOVARTIS PHARMA SAS doivent être strictement suivies par le collaborateur."
Attendu que le code de conduite et les instructions adjointes constituent des prescriptions générales et permanentes aux sens de l'article L 122.39 du Code du travail et constituent à l'évidence une modification du règlement intérieur qui aurait dû être présentée pour avis au CE, à l'inspection du travail et au CHSCT.
Qu'en effet pour ce dernier les règles édictées peuvent, selon leur application inférer sur la santé mentale du personnel.
Qu'il sera donc fait droit aux demandes dans les termes du dispositif, la société NOVARTIS étant quant à elle déboutée sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Vu l'article 809 du nouveau Code de procédure civile.
Disons que la diffusion sur le site intranet NOVARTIS de nouvelles dispositions relatives au "code de conduite NOVARTIS" constitue un trouble manifestement illicite, en ce qu'elles portent atteinte à la vie privée du personnel, et en ce qu'elles n'ont pas été précédées de l'information et de la consultation du CE, du CHSCT, ni de communication préalable à l'inspection du travail, en ce qu'elles constituent une modification du règlement intérieur et un risque pour la santé mentale du personnel.
Enjoignons à la société défenderesse de faire cesser la diffusion de ces informations sur son site intranet, jusqu'à consultation du CE, du CHSCT et communication préalable de l'inspection du travail et ce sous astreinte de 10000 euros par jour de retard passé 24 heures de la présente ordonnance.
Nous réservons la liquidation de l'astreinte.
Condamnons la société NOVARTIS à payer au CE et au syndicat force ouvrière conjointement la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; outre les dépens
Fait à NANTERRE, le 06 octobre 2004