DROIT INFORMATIQUE

Jurisprudence

Cass. crim., 25 mai 1992
pourvoi 91-83.440

droit informatique

Les grands arrêts de la jurisprudence en droit informatique : arrêt de la Cour de cassation, chambre criminelle, du 25 mai 1992 (pourvoi 91-83.440)

Cour de cassation, chambre criminelle
25 mai 1992, pourvoi 91-83.440

REJET du pourvoi formé par :

- X... Alain,

contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, chambre correctionnelle, en date du 14 mai 1991, qui l'a condamné, pour contrefaçon de logiciel, à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 1, 2 et 3 de la loi du 11 mars 1957, 4 et 426-1 du Code pénal, 485 et 512 du Code de procédure pénale, ensemble violation de l'article 6. 2 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable de contrefaçon dans les termes de la prévention fondée sur l'article 426-1 du Code pénal ;

" aux motifs propres et adoptés qu'Alain X..., contrairement à ses déclarations, n'est ni le concepteur ni l'auteur intellectuel du logiciel qu'il a acheté à la société CBII de Claude Y..., à l'analyse duquel tout au plus il a peut-être participé ; en effet, Hervé Z..., qui a travaillé pour la CBII, a déclaré avoir réalisé la programmation de l'étude qui avait été réalisée par M. Y... pour les besoins du commerce de gros de poissonnerie de son client ; par ailleurs, X... reconnaît avoir signé le contrat du 24 janvier 1986 ; il conteste seulement la présence de la page relative à la clause d'exclusivité en arguant du fait que les pages n'ont pas été numérotées et paraphées ; Alain X... admet pourtant qu'il est écrit en première page la phrase suivante : le client, par le présent contrat, commande au fournisseur d'une implantation informatique dont le détail suit page 2, il ne peut donc soutenir que son exemplaire du contrat ne comportait pas cette page essentielle relative au matériel et sur laquelle figure la clause d'exclusivité, il peut d'autant moins dire qu'il n'a jamais été en possession de la page 2 qu'à la 3e page de son exemplaire il est écrit : l'implantation informatique ci-dessus désignée... phrase faisant référence à la page précédente qu'il nie avoir signée ; que s'il est bien exact que la loi nouvelle applicable le 1er janvier 1986 ne s'applique pas aux logiciels créés antérieurement, les concepteurs de ces logiciels sont MM. Y... et Z... qui les ont imaginés, et qu'en l'espèce la présomption de propriété instituée par ce texte au profit de l'employeur ne saurait jouer ; que X... a donc bien contrefait, en le commercialisant et en le faisant évoluer sans autorisation, le logiciel créé par Claude Y... ;

" alors que 1°) l'article 426-1 du Code pénal a été institué par l'article 56 de la loi du 3 juillet 1985 qui ne s'applique pas aux logiciels créés antérieurement à son entrée en vigueur, intervenue le 1er janvier 1986 ; qu'il résultait des propres énonciations de l'arrêt que le logiciel argué de contrefaçon avait été créé antérieurement au 1er janvier 1986 ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors déclarer X... coupable de contrefaçon dans les termes de la prévention fondée sur l'article 426-1 susvisé ;

" alors que 2°) en retenant que les parties civiles, MM. Y... et Z..., étaient les concepteurs et auteurs intellectuels du logiciel, aux seuls motifs que le second avait déclaré avoir réalisé la programmation de l'étude qui avait été réalisée par M. Y..., la cour d'appel, qui n'a pas justifié de leur qualité de créateurs par des éléments de fait extrinsèques à leurs déclarations, a, tout à la fois, privé sa décision de base légale, renversé la charge de la preuve, et méconnu le principe de la présomption d'innocence ;

" alors que 3°) en déclarant opposable à X... la clause d'exclusivité inscrite à la page 2 du contrat du 24 janvier 1986, sans justifier de ce qu'il aurait soit signé, soit paraphé cette page 2, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale, renversé la charge de la preuve et méconnu le principe de la présomption d'innocence " ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement auquel il se réfère que, pour déclarer Alain X... coupable de l'infraction prévue par l'article 426-1 du Code pénal, les juges du fond exposent que la société CBII, dirigée par Claude Y..., a conclu le 24 janvier 1986 avec la société SOBOMAR, dont le prévenu est le président, un contrat de vente, assorti d'une clause d'exclusivité, réservée à l'Aquitaine et à certains professionnels, portant sur un système informatique (matériel et logiciel) dénommé Télémarée ; que les juges retiennent qu'Alain X..., qui n'est ni le concepteur ni le réalisateur de ce système, a reconnu s'en être servi pour élaborer d'autres logiciels destinés à diverses autres professions, produits qu'il a commercialisés ; qu'il a procédé ainsi sans autorisation et en méconnaissance de la clause d'exclusivité prévue au contrat qu'il a signé ;

Attendu qu'en cet état, si c'est à tort que la cour d'appel a cru devoir retenir l'incrimination prévue par l'article 426-1 du Code pénal, alors que les faits, souverainement appréciés par les juges et retenus à la charge du prévenu, entrent dans les prévisions de l'article 47 de la loi du 3 juillet 1985- applicable à compter du 1er janvier 1986, quelle que soit la date de création du logiciel concerné-et sont réprimés par les articles 425 et 426 du Code pénal, la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que la déclaration de culpabilité et la peine, prononcée dans les limites fixées par ces derniers textes, sont légalement justifiées au regard de l'article 598 du Code de procédure pénale ;

Qu'ainsi le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen de cassation : (sans intérêt) ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.

 

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